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État de nécessité : un danger qu’aucune mesure actuelle ne permettrait de prévenir ne peut être assimilé à un danger actuel ou imminent

Pénal - Droit pénal général
29/06/2021
Dans un arrêt du 15 juin 2021, la Cour de cassation affirme qu’un danger futur qu’aucune mesure actuelle ne permettrait de prévenir ne peut être assimilé, à un danger actuel ou imminent susceptible d'écarter la responsabilité pénale d'un individu au motif qu'il répond selon l'article 122-7 du Code pénal, à un état de nécessité.
La Cour de cassation a tranché : la volonté de dénoncer la vulnérabilité d’un site nucléaire aux attaques terroristes ne peut pas justifier une intrusion non autorisée sur ce site.
 
Concrètement, huit membres de l’association Greenpeace France se sont vus délivrer une convocation devant le tribunal correctionnel pour intrusion, sans autorisation de l’autorité compétente, dans l’enceinte d’une installation civile abritant des matières nucléaires, au sein de terrains clos, en réunion et avec dégradation. L’enquête préliminaire qui s’est poursuivie a conduit à la convocation, devant cette même juridiction de l’association Greenpeace du chef de la même infraction, et d’une personne physique pour complicité. Ils ont été déclarés coupables.
 
Prévenus, ministère public et société EDF, partie civile, ont relevé appel de cette décision. Les prévenus invoquent l’état de nécessité. La cour d’appel écarte et rappelle que leur intrusion avait pour objet de dénoncer, par une action à retentissement médiatique, le manque de fiabilité de la protection d’une zone à accès réglementé et sécurisé. Néanmoins, l’article 122-7 du Code pénal prévoit que l’état de nécessité ne peut être utilement invoqué que si « le danger est actuel ou imminent c’est-à-dire réel, certain et en cours de réalisation ou est susceptible de se réaliser dans un avenir immédiat en menaçant directement la personne qui a accompli l’acte illégal », et si cet « acte était le seul moyen de l’éviter ». En l’espèce, le manque de protection représente « non un danger actuel ou imminent les menaçant directement, mais l’expression d’une crainte face à un risque potentiel, voire hypothétique ».
 
Confirmation de la Cour de cassation qui note que :
- un danger futur qu’aucune mesure actuelle ne permettrait de prévenir ne peut être assimilé à un danger actuel ou imminent au sens de l’article 122-7 du Code pénal ;
- l’infraction poursuivie n’était pas, par elle-même, de nature à remédier au danger dénoncé.
 
Concernant la condamnation pour complicité du délit d’intrusion dans l’enceinte d’une installation civile abritant des matières nucléaires en réunion et avec dégradation, la cour d’appel énonce notamment que le prévenu connaissait parfaitement le détail de l’opération au point qu’il a pu en décrire précisément les modalités aux journalistes qui l’accompagnaient et s’est associé à la réussite de l’opération en en faisant le bilan face à la caméra des journalistes. « En l’état de ces énonciations, fondées sur son appréciation souveraine des faits et qui caractérisent des actes d’aide et assistance à l’acte principal d’intrusion poursuivi, la cour d’appel a justifié sa décision » soutient la Cour de cassation.
 
 
Source : Actualités du droit