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Chambre de l’instruction et droit de se taire : le Conseil constitutionnel a tranché

Pénal - Procédure pénale
09/04/2021
Dans une décision attendue du 9 avril 2021, le Conseil constitutionnel a déclaré non-conforme l’article 199 du Code de procédure pénale. La chambre de l'instruction doit informer la personne mise en examen qui comparaît devant elle de son droit de se taire.
Plusieurs questions prioritaires de constitutionnalité renvoyées au Conseil constitutionnel portaient sur la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l’article 199 du Code de procédure pénale dans sa rédaction résultant de la loi du 3 juin 2016 (Chambre de l’instruction et droit de se taire : des QPC renvoyées, Actualités du droit, 12 févr. 2021 et Chambre de l’instruction et droit de se taire : une QPC renvoyée, Actualités du droit, 27 janv. 2021).
 
Cet article qui définit les règles de procédure applicables aux audiences tenues par la chambre de l’instruction, méconnaîtrait le principe selon lequel nul n'est tenu de s'accuser ainsi que les droits de la défense. En effet, ses dispositions ne prévoient pas que la chambre de l’instruction saisie d'une requête en nullité contre une mise en examen, d'un appel à l'encontre d'une ordonnance de placement en détention provisoire ou du règlement d'un dossier d'information, doit notifier à la personne comparaissant personnellement devant elle son droit de se taire. Pourtant, cette dernière « peut être, en l'absence de notification de ce droit, amenée à faire des déclarations contraires à ses intérêts ».
 
Un des requérants reproche aussi au texte de méconnaître le principe d’égalité devant la justice en ce qu’il créé une différence de traitement injustifiée au regard des personnes comparaissant dans le cadre d'autres recours.
 
Le Conseil constitutionnel censure.
 
Il relève que la chambre de l’instruction, saisie d’une requête en nullité formée contre une décision de mise en examen ou d'un appel à l'encontre d'une ordonnance de placement en détention provisoire ou du règlement d’un dossier d’information, soit dans le cadre d'un appel formé contre une ordonnance de règlement, soit à la suite d'un renvoi après cassation, porte « une appréciation sur les faits retenus à titre de charges contre la personne mise en examen ».
 
Aussi, lorsque la personne mise en examen comparaît devant la chambre de l'instruction, à sa demande ou à celle de la chambre, elle peut être amenée, en réponse aux questions qui lui sont posées, à reconnaître les faits qui lui sont reprochés. Or, « les déclarations ou les réponses apportées par la personne mise en examen aux questions de la chambre de l'instruction sont susceptibles d'être portées à la connaissance de la juridiction de jugement ».
 
Conclusion : en ne prévoyant pas que la personne mise en examen doit être informée de son droit de se taire, « les dispositions contestées portent atteinte à ce droit ».
 
Le Conseil constitutionnel qui censure les mots « la comparution personnelle des parties ainsi que » figurant au quatrième alinéa de l'article 199 du Code de procédure pénale, le sixième alinéa et la dernière phrase du huitième alinéa, prévoit de reporter l’abrogation de ces dispositions au 31 décembre 2021. Les Sages prévoient également que les mesures prises avant la publication de la présente décision ne peuvent être contestées sur le fondement de cette inconstitutionnalité. Néanmoins pour faire cesser l’inconstitutionnalité, la chambre de l’instruction doit informer la personne mise en examen qui comparaît devant elle de son droit de se taire jusqu’à la loi nouvelle.
 

Rappelons que le 4 mars dernier, le Conseil constitutionnel a également décidé que dispositions de l’article 396 du Code de procédure pénale relatives à la procédure de présentation devant le JLD dans le cadre d’une comparution immédiate sont contraires à la Constitution, faute d’information du prévenu sur son droit de se taire (Comparution immédiate et droit de se taire : censure du Conseil constitutionnel, Actualités du droit, 5 mars 2021). La date d’abrogation fixée est la même.
 
 
 
 
Source : Actualités du droit